salam alikom
Daniela est une adolescente de 17 ans qui vous est jusqu’ici inconnue et qui souffre d’une mucoviscidose classique. Elle se présente avec sa maman, son pédiatre étant absent.
Question 1
Lorsque le diagnostic a été posé, alors qu’elle avait 6 semaines, elle aurait présenté une hyperbilirubinémie (bilirubine totale: 195 μmol/l, bilirubine directe: 52 μmol/l) qui s’est corrigée spontanément. Comment expliquez-vous cette hyperbilirubinémie «néonatale» passagère tardive (ictère prolongé) dans le contexte d’une mucoviscidose?
Question 2
A l’âge de 4 ans, Daniela a été traitée pour des calculs rénaux. Les calculs étaient formés d’oxalate de calcium. Quelle relation existe entre calculs rénaux et mucoviscidose?
Question 3
Depuis quelques mois Daniela se réveille la nuit à cause de difficultés respiratoires et douleurs dans l’hémithorax gauche. L’examen clinique révèle une tachypnée à 38/ min (norme: <25/min) et une péjoration de la saturation en oxygène (diminution de 90–92% à 80–85%). Quelle complication classique de la mucoviscidose craignez-vous devant cette anamnèse et cette clinique?
Question 4
Daniela souffre souvent de douleurs assez fortes dans la fosse iliaque droite (parfois accompagnées de vomissements). La palpation de l’abdomen révèle une résistance à cet endroit. De quoi s’agit-il?
Question 5
Un étudiant en médecine présent à la consultation, mentionne qu’environ 1:1600 nouveaux-nés souffrent d’une mucoviscidose. Quel pourcentage de la population vivant en Suisse est donc porteur du gène hétérozygote pour la mucoviscidose? (Important: ne considérez pas le fait que la maladie est parfois diagnostiquée déjà in utero.)
Réponse et commentaire 1
L’ictère prolongé dans le cadre d’une mucoviscidose est dû au refoulement de bile dans le sens d’un syndrome d’hyperviscosité, connu aussi sous le nom de «insipated bile duct syndrom». On l’observe chez environ 15% des nouveau-nés avec mucoviscidose. Cette forme de cholestase néonatale se manifeste parfois aussi sous forme de selles acholiques, raison pour laquelle il faut considérer la mucoviscidose dans le diagnostic différentiel de l’atrésie des voies biliaires.
Réponse et commentaire 2
Le risque élevé pour le patient avec une mucoviscidose de développer des calculs rénaux est dû à la combinaison d’hyperoxalurie secondaire, hypercitraturie et volume urinaire réduit. Chez ces patients, les calculs rénaux ne se manifestent cliniquement qu’à l’adolescence ou jeune âge adulte; il s’agit typiquement de calculs d’oxalate de calcium. Les deux mécanismes suivants jouent un rôle central dans la pathogénèse de cette forme d’hyperoxalurie secondaire: la bactérie Oxalobacter formigens, présente dans le colon, réduit l’oxalate intestinal et diminue ainsi la résorption d’oxalate et par conséquent aussi la quantité d’oxalate éliminé par l’urine. La colonisation de l’intestin avec Oxalobacter formigens corrèle avec un risque diminué de formation de calculs d’oxalate de calcium. L’hyperoxalurie et le risque accru de calculs rénaux chez les patients avec mucoviscidose est associé avec l’inhibition resp. l’absence totale de croissance d’oxalobacter suite aux traitements antibiotiques fréquents.
Dans le cadre d’une malabsorption (stéatorrhée) le calcium intestinal est fixé plus intensément aux acides gras libres, il se forme donc moins d’oxalate de calcium dans l’intestin et l’oxalate est résorbé en quantité plus importante, ce qui augmente à son tour le risque de formation de calculs rénaux.
Un autre élément important dans la génèse des calculs est l’hypocitraturie fréquente chez les patients avec mucoviscidose. Lors d’acidose métabolique et/ou surcharge en acides (p.ex. alimentaire) et d’un déficit en potassium, la réabsorption tubulaire accrue et le métabolisme rénal du citrate provoquent une hypocitraturie. Le citrate urinaire réduit la formation de cristaux et donc la formation de calculs, sa diminution accroît donc le risque de formation de calculs. Il n’est pour l’instant pas clair quel mécanisme physiopathologique est responsable en premier lieu pour l’hypocitraturie chez les patients avec mucoviscidose. Ces patients ont aussi un volume urinaire globalement réduit, surtout en raison des pertes plus importantes d’eau par la peau et le tube digestif. L’augmentation de la densité urinaire qui en résulte, augmente encore le risque de formation de calculs. L’importance d’autres facteurs responsables de la formation de calculs rénaux chez les patients avec mucoviscidose fait encore l’objet d’études.
Réponse et commentaire 3
L’inflammation chronique des voies respiratoires engendre au stade avancé d’une mucoviscidose une destruction progressive du poumon avec brochiectasies et formation de bulles. Lorsqu’elles sont placées en périphérie, ces dernières peuvent éclater suite à une quinte de toux et provoquer un pneumothorax avec douleur et dyspnée.
La gravité de la maladie et l’âge sont des facteurs de risque favorisant l’apparition d’un pneumothorax.
La présence de Pseudomonas aeruginosa et Aspergillus fumigatus est aussi considérée comme un facteur de risque possible. Des symptômes semblables, mais moins marqués, peuvent aussi apparaître suite au «mucus plug syndrom», c’est à dire l’obstruction aiguë d’une bronche moyenne par un bouchon muqueux desséché et visqueux.
Réponse et commentaire 4 La plupart des douleurs abdominales chez les patients avec une mucoviscidose sont dues à un trouble de la motilité intestinale et à un contenu intestinal épaissi (moins de liquide, production accrue de mucus intestinal, secrétions des voies respiratoires supérieures et inférieures avalées et mal digérées) responsables d’une constipation chronique. Lorsque l’obstruction est totale, on parle du syndrome d’obstruction intestinale distal ou «équivalent de l’iléus méconial» qui se présente par des douleurs abdominales violentes, une distension abdominale et la présence d’une masse palpable à la fosse iliaque droite. On l’observe chez 10–47% des patients avec mucoviscidose, le plus souvent à l’âge scolaire.
Les diagnostics différentiels sont l’appendicite, l’invagination et la colopathie fibrosante (très rare de nos jours).
L’abdomen à vide montre typiquement des masses stercorales dans le colon droit, souvent avec des niveaux aériens dans le grêle.
Ce syndrome obstructif est probablement le résultat de résidus alimentaires insuffisamment digérés, de déshydratation, de troubles de la motilité avec stase du contenu intestinal et se présente la plupart des fois au passage de l’iléum terminal au colon ascendant. Le traitement consiste à corriger la déshydratation et en un traitement évacuateur intensif avec des laxatifs osmotiques (p.ex. Fordtran, Transipeg) ou N-Acétylcystéine ou par des lavements de gastrographine.
Une intervention chirurgicale n’est que rarement nécessaire.
Réponse et commentaire 5
La mucoviscidose est – outre l’hémochromatose héréditaire – la deuxième maladie héréditaire autosomique récessive la plus fréquente de la population blanche. Comme pour beaucoup de maladies génétiques, la fréquence de la mucoviscidose dépend de l’origine ethnique d’une population. Alors que dans la population asiatique seulement 1 enfant sur 100 000 ou dans la population afro-américaine 1 enfant sur 17 000 souffre de cette maladie, l’incidence en Amérique du Nord et en Europe se situe entre 1:2500 et 1:1600; en Suisse elle est actuellement estimée à 1:2500. En Europe environ 4–5% des personnes sont porteurs sains d’une mutation pour la mucoviscidose, ce qui a pour conséquence que chez 1/600 resp. 1/400 couples, les deux partenaires portent une gène sain et un gène muté. Ces couples encourent avec chaque grossesse un risque de 25% d’avoir un enfant malade (1:25 x 1:25 x 1:4 = 2500).
http://www.swiss-paediatrics.org/sites/default/files/paediatrica/vol20/n3/pdf/73-76.pdf
Daniela est une adolescente de 17 ans qui vous est jusqu’ici inconnue et qui souffre d’une mucoviscidose classique. Elle se présente avec sa maman, son pédiatre étant absent.
Question 1
Lorsque le diagnostic a été posé, alors qu’elle avait 6 semaines, elle aurait présenté une hyperbilirubinémie (bilirubine totale: 195 μmol/l, bilirubine directe: 52 μmol/l) qui s’est corrigée spontanément. Comment expliquez-vous cette hyperbilirubinémie «néonatale» passagère tardive (ictère prolongé) dans le contexte d’une mucoviscidose?
Question 2
A l’âge de 4 ans, Daniela a été traitée pour des calculs rénaux. Les calculs étaient formés d’oxalate de calcium. Quelle relation existe entre calculs rénaux et mucoviscidose?
Question 3
Depuis quelques mois Daniela se réveille la nuit à cause de difficultés respiratoires et douleurs dans l’hémithorax gauche. L’examen clinique révèle une tachypnée à 38/ min (norme: <25/min) et une péjoration de la saturation en oxygène (diminution de 90–92% à 80–85%). Quelle complication classique de la mucoviscidose craignez-vous devant cette anamnèse et cette clinique?
Question 4
Daniela souffre souvent de douleurs assez fortes dans la fosse iliaque droite (parfois accompagnées de vomissements). La palpation de l’abdomen révèle une résistance à cet endroit. De quoi s’agit-il?
Question 5
Un étudiant en médecine présent à la consultation, mentionne qu’environ 1:1600 nouveaux-nés souffrent d’une mucoviscidose. Quel pourcentage de la population vivant en Suisse est donc porteur du gène hétérozygote pour la mucoviscidose? (Important: ne considérez pas le fait que la maladie est parfois diagnostiquée déjà in utero.)
Réponse et commentaire 1
L’ictère prolongé dans le cadre d’une mucoviscidose est dû au refoulement de bile dans le sens d’un syndrome d’hyperviscosité, connu aussi sous le nom de «insipated bile duct syndrom». On l’observe chez environ 15% des nouveau-nés avec mucoviscidose. Cette forme de cholestase néonatale se manifeste parfois aussi sous forme de selles acholiques, raison pour laquelle il faut considérer la mucoviscidose dans le diagnostic différentiel de l’atrésie des voies biliaires.
Réponse et commentaire 2
Le risque élevé pour le patient avec une mucoviscidose de développer des calculs rénaux est dû à la combinaison d’hyperoxalurie secondaire, hypercitraturie et volume urinaire réduit. Chez ces patients, les calculs rénaux ne se manifestent cliniquement qu’à l’adolescence ou jeune âge adulte; il s’agit typiquement de calculs d’oxalate de calcium. Les deux mécanismes suivants jouent un rôle central dans la pathogénèse de cette forme d’hyperoxalurie secondaire: la bactérie Oxalobacter formigens, présente dans le colon, réduit l’oxalate intestinal et diminue ainsi la résorption d’oxalate et par conséquent aussi la quantité d’oxalate éliminé par l’urine. La colonisation de l’intestin avec Oxalobacter formigens corrèle avec un risque diminué de formation de calculs d’oxalate de calcium. L’hyperoxalurie et le risque accru de calculs rénaux chez les patients avec mucoviscidose est associé avec l’inhibition resp. l’absence totale de croissance d’oxalobacter suite aux traitements antibiotiques fréquents.
Dans le cadre d’une malabsorption (stéatorrhée) le calcium intestinal est fixé plus intensément aux acides gras libres, il se forme donc moins d’oxalate de calcium dans l’intestin et l’oxalate est résorbé en quantité plus importante, ce qui augmente à son tour le risque de formation de calculs rénaux.
Un autre élément important dans la génèse des calculs est l’hypocitraturie fréquente chez les patients avec mucoviscidose. Lors d’acidose métabolique et/ou surcharge en acides (p.ex. alimentaire) et d’un déficit en potassium, la réabsorption tubulaire accrue et le métabolisme rénal du citrate provoquent une hypocitraturie. Le citrate urinaire réduit la formation de cristaux et donc la formation de calculs, sa diminution accroît donc le risque de formation de calculs. Il n’est pour l’instant pas clair quel mécanisme physiopathologique est responsable en premier lieu pour l’hypocitraturie chez les patients avec mucoviscidose. Ces patients ont aussi un volume urinaire globalement réduit, surtout en raison des pertes plus importantes d’eau par la peau et le tube digestif. L’augmentation de la densité urinaire qui en résulte, augmente encore le risque de formation de calculs. L’importance d’autres facteurs responsables de la formation de calculs rénaux chez les patients avec mucoviscidose fait encore l’objet d’études.
Réponse et commentaire 3
L’inflammation chronique des voies respiratoires engendre au stade avancé d’une mucoviscidose une destruction progressive du poumon avec brochiectasies et formation de bulles. Lorsqu’elles sont placées en périphérie, ces dernières peuvent éclater suite à une quinte de toux et provoquer un pneumothorax avec douleur et dyspnée.
La gravité de la maladie et l’âge sont des facteurs de risque favorisant l’apparition d’un pneumothorax.
La présence de Pseudomonas aeruginosa et Aspergillus fumigatus est aussi considérée comme un facteur de risque possible. Des symptômes semblables, mais moins marqués, peuvent aussi apparaître suite au «mucus plug syndrom», c’est à dire l’obstruction aiguë d’une bronche moyenne par un bouchon muqueux desséché et visqueux.
Réponse et commentaire 4 La plupart des douleurs abdominales chez les patients avec une mucoviscidose sont dues à un trouble de la motilité intestinale et à un contenu intestinal épaissi (moins de liquide, production accrue de mucus intestinal, secrétions des voies respiratoires supérieures et inférieures avalées et mal digérées) responsables d’une constipation chronique. Lorsque l’obstruction est totale, on parle du syndrome d’obstruction intestinale distal ou «équivalent de l’iléus méconial» qui se présente par des douleurs abdominales violentes, une distension abdominale et la présence d’une masse palpable à la fosse iliaque droite. On l’observe chez 10–47% des patients avec mucoviscidose, le plus souvent à l’âge scolaire.
Les diagnostics différentiels sont l’appendicite, l’invagination et la colopathie fibrosante (très rare de nos jours).
L’abdomen à vide montre typiquement des masses stercorales dans le colon droit, souvent avec des niveaux aériens dans le grêle.
Ce syndrome obstructif est probablement le résultat de résidus alimentaires insuffisamment digérés, de déshydratation, de troubles de la motilité avec stase du contenu intestinal et se présente la plupart des fois au passage de l’iléum terminal au colon ascendant. Le traitement consiste à corriger la déshydratation et en un traitement évacuateur intensif avec des laxatifs osmotiques (p.ex. Fordtran, Transipeg) ou N-Acétylcystéine ou par des lavements de gastrographine.
Une intervention chirurgicale n’est que rarement nécessaire.
Réponse et commentaire 5
La mucoviscidose est – outre l’hémochromatose héréditaire – la deuxième maladie héréditaire autosomique récessive la plus fréquente de la population blanche. Comme pour beaucoup de maladies génétiques, la fréquence de la mucoviscidose dépend de l’origine ethnique d’une population. Alors que dans la population asiatique seulement 1 enfant sur 100 000 ou dans la population afro-américaine 1 enfant sur 17 000 souffre de cette maladie, l’incidence en Amérique du Nord et en Europe se situe entre 1:2500 et 1:1600; en Suisse elle est actuellement estimée à 1:2500. En Europe environ 4–5% des personnes sont porteurs sains d’une mutation pour la mucoviscidose, ce qui a pour conséquence que chez 1/600 resp. 1/400 couples, les deux partenaires portent une gène sain et un gène muté. Ces couples encourent avec chaque grossesse un risque de 25% d’avoir un enfant malade (1:25 x 1:25 x 1:4 = 2500).
http://www.swiss-paediatrics.org/sites/default/files/paediatrica/vol20/n3/pdf/73-76.pdf